Une idée de moins en moins improbable

Après avoir embrassé Chrissie, j'étais content et joyeux sur le coup mais j'ai failli le regretter. Le soir même sur Facebook, ça a commencé à jaser à cause de son nouveau statut : "Je suis la femme la plus heureuse du monde et c'est grâce à toi, Fred..." Tous nos amis en commun ont cru qu'on sortait ensemble ou qu'on avait couché ensemble. J'ai reçu en quelques heures des dizaines de SMS. J'ai vu que Chrissie avait reçu elle aussi beaucoup de questions sur son profil, elle n'a rien dit sur le baiser mais elle a juste répondu que j'étais quelqu'un de bien et qu'elle était contente d'avoir fait ma connaissance. Mais sa réponse a entraîné d'autres questions "Bien... sur tous les plans ?" ou "Tu le connais donc très, très bien maintenant?..." Elle n'a plus répondu et elle a laissé dire.

J'étais un peu mal à l'aise, surtout par rapport à Lena. Je me demandais ce qu'elle allait en penser mais après réflexion, je me suis dit que ça pouvait peut-être jouer en ma faveur et si elle voulait me garder pour elle, elle allait peut-être enfin réagir. Mais je n'ai pas eu de ses nouvelles.

En lisant mes SMS, j'ai été surpris de recevoir celui de Nancy, mon ex. Je n'avais plus eu de ses nouvelles depuis notre rupture et là elle m'écrit ça : "Chrissie est une jolie fille et vous formez un très joli couple, j'espère que tu seras très heureux avec elle. Bisous". Ce texto m'a scié sur place. Je l'ai lu et relu plusieurs fois, chaque mot était important et l'ensemble sonnait vrai. Je ne ressentais plus rien pour Nancy mais j'avoue que ce message m'avait touché. Je crois que c'est la première fois que Nancy me parlait si sincèrement. Je ne savais pas vraiment quoi lui répondre. Je ne voulais lui dire que je ne sortais pas avec Chrissie, j'ai fini par lui répondre : "Merci." tout simplement.

Mais le message de Nancy me ramena finalement à une réalité : je ne sortais pas avec Chrissie. Tout le monde le pensait, je me suis dit que peut-être Chrissie le pensait aussi. Je devais lui parler pour mettre les choses au clair avec elle. Je n'avais pas son numéro, je ne voulais pas lui envoyer de mail, je suis donc allé la voir chez elle. En arrivant, c'est sa soeur qui m'a accueilli et avec le sourire.

- Je suppose que tu es venu voir Chrissie. Elle n'est pas là.

- Tant pis alors. Tu lui diras que je suis passé.

- Elle sera très déçue de t'avoir raté... Elle était vraiment contente la fois dernière après ta visite.

- Ah ouais ?

- Je ne sais pas ce que tu lui as fait dans la chambre mais elle n'était plus malade du tout après.

J'ai souri. Je lui ai dit que je repasserai plus tard. Je suis redescendu et avant de sortir de la résidence, je suis tombé nez à nez avec Chrissie qui venait de passer le portail. Quand je l'ai vu, ça m'a fait quelque chose comme un bond au coeur. Elle portait une veste et une jupe, elle avait laissé ses cheveux libres, je l'ai trouvé très féminine, très jolie. Quand elle m'a vu, elle a souri, j'ai tout de suite su qu'elle était heureuse de me voir. Je lui ai fait la bise, elle m'a demandé si j'étais passé la voir. Pour plaisanter, je lui ai répondu : "Non, je suis passé faire un coucou à ta soeur." Elle a souri. Je repris :

- Plus sérieusement,  oui, c'est toi que je suis venu voir. Je suis content de te croiser ici, on aurait pu se rater à une minute près. J'aimerai te parler, tu aurais un moment à m'accorder.

Elle me proposa :

- Si ça te dit, on pourrait marcher jusqu'au parc.

- Oui, il n'y a pas de problème.

En marchant à ses côtés, j'étais concentré sur ce que je voulais lui dire, je ne voulais pas lui faire du mal et encore moins la mettre en colère. À force de réfléchir, c'est elle qui a pris les devants :

- Tu veux sûrement me parler de ce que j'ai mis en statut sur Facebook. Je suis désolée, j'étais tellement contente après ta visite que j'ai eu envie de le dire au monde entier. Mais ne t'inquiète pas, je vais le changer.

- Tu sais, ça ne me dérange pas trop ce statut mais depuis beaucoup de monde pense qu'on est ensemble et je voulais voir ça avec toi, pour savoir ce que toi tu en penses.

- En fait, tu te demandes si moi aussi je pense qu'on sort ensemble parce que tu m'as embrassée. Rassures-toi, je ne suis pas mytho, pas encore.

Nous sommes arrivés au parc, elle m'a indiqué un banc sur lequel on s'es assis. Je n'avais plus envie de parler de choses qui fâchent, j'ai préféré changer de sujet :

- Tu es très jolie dans cette jupe.

- C'est plus jolie en tout cas que mon vieux pyjama.

- Ce n'est pas ce que j'ai voulu dire.

- Quand je me suis regardée dans le miroir après ton départ, j'ai eu honte. Je me suis dit "Et il m'a embrassée alors que j'étais dans cet état."...

- C'est ta bouche que j'ai embrassée, pas ton pyjama, heureusement!

Elle a ri. Je me sentais bien près d'elle, j'étais étrangement attirée par elle. Depuis le baiser, je crois que notre relation avait changé, je la sentais douce, je la sentais amoureuse. Je la désirais très fort malgré moi. J'ai regardé son sac de courses et je lui ai demandé :

- Tu viens de faire des courses ?

- Je suis allée acheter un cadeau pour ma soeur. Demain, c'est son annif.

- Demain, c'est son annif, tu as organisé une fête ?

- Pas une grande fête, juste un gâteau avec quelques amis à elle mais elle ne sait rien encore, c'est une surprise.

- Je suis sûr qu'elle sera très contente.

- Tu peux venir si tu veux.

- Mais je la connais à peine.

- Elle t'aime bien et moi je serai là, je me sentirais moins seule quand elle sera avec ses amis.

Je l'ai regardée, j'étais content qu'elle m'invite et je voyais qu'elle y tenait. Je lui ai répondu :

- OK, je serai là. C'est à quelle heure ?

- C'est à 17 heures. Tu peux arriver un peu avant si tu veux, je serai à l'appart en train de tout préparer.

Elle sortit un petit sachet de son sac de courses et elle me le donna.

- Si tu viens, gardes ça avec toi, c'est le cadeau de ma soeur. Tu l'emmèneras avec toi demain, je n'ai pas très envie qu'elle tombe dessus ce soir.

- D'accord. J'espère que je ne vais pas l'oublier demain.

- Tu ne l'oublieras pas, je compte sur toi.

Elle a souri et s'est levée.

- Je dois rentrer maintenant, m'a-t-elle dit.

Je l'ai raccompagnée et je lui ai dit : "À demain!"

Elle m'a fait un bisou sur la joue, ce genre de bisou qui donne des frissons. Chrissie était adorable et attirante. En rentrant chez moi, j'étais complètement chamboulé et je commençais à ressentir pour elle un peu plus que de l'amitié, je crois. L'idée de sortir avec elle ne me semblait plus si improbable, je commençais même à penser que je pourrais être heureux avec elle.

Tiré du journal de Fred